ÉDITORIAL
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Vous êtes de petits coquins ! Ne vous sentez pas personnellement visé-e, mais vous m’avez forcé à chercher dans mes textes passés, afin de vérifier que je ne me trompais pas. Et en effet, j’évoquais encore à l’époque (au printemps dernier, et avec un optimisme très modéré) le maintien du réchauffement climatique à 1,5 degré. Et bien c’est définitivement terminé. Le bilan est limpide : aucun des engagements pris dans les Conférences des parties à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques précédentes n’est suffisant. Ces derniers seraient réalisés — ce qui n’est même pas le cas — que nous nous dirigerions toute de même vers du 3 degrés ! Or, aucun des 40 indicateurs de progrès élaborés par les chercheurs du rapport L’État de l’action climatique 2022 n’a évolué dans le bon sens à ce jour !
La 27e COP a commencé dimanche dernier à Charm el Cheikh ; elle durera jusqu’au 18 novembre et tentera de « renouveler la solidarité entre les pays du monde afin de concrétiser l’accord historique de Paris. » Dans ce noble but — sauver le monde, rien que ça ! — les chefs d’État, les ministres, les négociateurs, les militants proclimat, les maires, les chefs d’entreprise et les lobbyistes de tous horizons vont plancher sur les solutions à la crise climatiques et le respect de leurs engagements.
Comme si l’on ne connaissait pas les solutions. Comme s’il fallait attendre la COP pour tenir ses promesses. Comme si l’on n’avait pas compris que les efforts chez nous, c’est bien, mais financer les efforts dans les pays du sud global, c’est mieux. En 2015, la COP avait abouti à une promesse de leur verser 130 milliards de dollars par année, à partir de 2020 (vous voyez un peu comment ça fonctionne. Ça ne vous rappelle pas certaines promesses libérales ?). Ce chiffre n’est même pas atteint en 2020, alors vous pensez, en 2022 ! Parce qu’évidemment, l’effet de reprise post-COVID étant passé, nous sommes désormais empêtrés dans une récession (que nos élus osent à peine nommer telle) et dans une crise énergétique sans précédent depuis 50 ans. Dès lors, où trouver l’argent ? D’ici le 18 novembre, une fronde des pays les plus pauvres — qui sont, comme par hasard, les plus touchés par les catastrophes naturelles — n’est pas impossible…
Et je ne parle même pas de reconnaitre les pertes et les dommages que ces pays ont subis dans le passé, du fait de la responsabilité historique de quelques pays, dont le Canada, dans la crise climatique actuelle. Quid des actions entreprises par les plus grands pollueurs de la planète, l’Inde, la Chine, la Russie et les États-Unis ? Seules 24 « parties » ont déposé une mise à jour de leur cible de réduction des GES.
Pourquoi la mise en place des solutions contre la crise climatique n’avance-t-elle pas plus vite ? D’abord à cause d’une incompréhension profonde de la situation, qui n’est pas seulement physique, économique et technique, mais sociopolitique : les lobbys, les intérêts divergents des états nationaux s’ajoutent à l’impossibilité intellectuelle de se projeter, de se figurer les conséquences matérielles de la crise. Et on vous les donnerait, vous n’y croiriez pas ! Ainsi est fait le cerveau humain… Je désespère que les états participants à la COP 27 aient l’honnêteté de reconnaitre le pétrin cosmique dans lequel nous nous trouvons.
