ÉDITORIAL
Vivre à deux mètres de distance : hypocrisie sociale ?
Bon, déjà mettons les choses au clair : le risque d’attraper un virus tel que la Covid-19 diminue de 80 % lorsque l’on est à un mètre de distance les uns des autres, et encore de moitié si l’on y ajoute un autre mètre (Lancet, juin 2020). Les pouvoirs publics ont assimilé ces informations et ont récemment modifié les règles de vie en société en toute logique, c’est-à-dire en prenant en compte l’évolution de l’épidémie au Québec. Ainsi, en Outaouais, on ne rapporte plus aucun mort et seulement six nouveaux cas, alors que j’écris ces lignes.
Afin d’optimiser notre protection et réduire au maximum la deuxième vague, qui doit immanquablement suivre le déconfinement, plusieurs « gestes barrières » sont suggérés (dans la sphère personnelle et privée) ou obligatoires (dans la sphère professionnelle ou sociale). Le port du masque à proximité, la limitation des contacts physiques, le lavage des mains et surtout le maintien d’une « distance sociale » ou distanciation physique. Il faut savoir que beaucoup d’organisations (commerces, associations, clubs de sport) luttent pour leur survie, simplement parce qu’elles doivent se conformer à ces nouvelles règles de distanciation sociale. Certaines ont d’ailleurs déjà disparu et ne rouvriront pas.
Or, que font les individus dans ce que j’appelle les regroupements « spontanés », tels que ceux que l’on peut observer dans les parcs ou sur les plages ? Tout le contraire. Lors de mes sorties de course à pied hebdomadaires, je suis à chaque fois choqué par la quantité de gens présents à la Marina, au Parc des Cèdres ou sur la plage, sans visiblement aucune espèce de préoccupation pour la fameuse distance sociale. Et avez-vous pris l’autobus ? Pourquoi être si strict dans sa mise en place institutionnelle, si c’est pour la contourner dès que l’on est plus au travail ou sous contrainte ? À quoi cela sert-il donc ?
Or, nous le savons depuis plusieurs mois : il va falloir partager l’espace public d’une manière différente. Au restaurant, dans les bars, les camps de jours, les parcs, les transports en commun ou pour tout type d’activité physique… ou tout simplement en marchant dans la rue, quand l’on croise autrui. Et nous savons pertinemment que ce ne sera pas permanent. Du reste, c’est pour cette raison que les activités sportives peuvent reprendre, selon un protocole précis, en cinq étapes pour des sports comme le soccer, par exemple : de la phase 1 (développement technique individuel et compétition sans contact à la phase 5 [retour à la normale avec déplacements entre régions], en passant par du jeu joué avec contact au sein d’un même groupe d’un même club [phase 2], de la compétition formelle dans le club [phase 3] ou entre clubs d’une même région [phase 4]. Cela va prendre du temps pour tous ces sports, sans lesquels nos enfants et nous-mêmes ne pourrions vivre bien. Ils sont essentiels, a fortiori pendant l’été pour les tenir occupés et en forme, puisque ce sont les vacances scolaires. Remarquez au passage que cela rend quasiment impossible toute rencontre de niveau élite, comme au niveau AA ou AAA…
Bref, vivre à distance les uns des autres est un véritable défi. Seulement, et bien que personne ne le désire, chacun d’entre nous devrait se poser la question : est-ce que je me comporte de manière responsable ?